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Nadine Morano ou le populisme roi


Il y a fort à parier que si Mme Morano passe à la postérité, ce soit en tant que cas d'école du populisme plutôt que pour son apport intellectuel au débat public. Mme Morano ou la politique nivelée par le bas.

Alors que la société française est au bord de l'implosion, arc-boutée sur elle-même, traversée par le doute, la peur, le chômage et la tentation réactionnaire, voici une ancienne ministre de la République qui vient dans le talk-show le plus regardé du pays lancer des arguments dignes de piliers de bar fatigués.

Pour parer aux attaques, la dame agite son cv, sa réussite au mérite (personne ne lui conteste ce point) et surtout son origine prolétaire.

- Moi je parle comme les vrais gens, je les connais, je les comprends et voilà pourquoi le 'milieu-journalistico-politico-parisien' me tient la dragée haute !

Mme, moi aussi je viens d'un milieu modeste, moi aussi je côtoie les 'vrais gens' (selon votre terminologie) et suis donc bien placé pour savoir que beaucoup d'âneries sont énoncées dans les PMU. On oserait espérer, venant de responsables de partis républicains (le vôtre a même kidnappé le terme, qu'il s'en montre donc à la hauteur), que ceux-ci exposent leurs idées, déroulent leurs propositions pour recréer le lien social, apaiser la société, nous faire repartir de l'avant, unis. Retrouver le fil. Combattre la bêtise, l'ignorance et la facilité du rejet.

Que nenni avec vous : gros sabots et vin qui tâche, 'la France judéo-chrétienne et de race blanche', on y va, on canonne lourd ! Vous donnez quitus à l'inculture et la paresse intellectuelle.

En cela, vous ne faites que reprendre la méthode de votre mentor Mr Sarkozy : diviser, cliver, monter les uns contre les autres. Comment disait-il, déjà ? Ah oui : 'décomplexer le langage'. Karcher & compagnie. Le début de tous les mots... Sauf que la société est complexe et que les mots ont un sens, puissant.

La terminologie 'race', depuis les atrocités de la seconde guerre mondiale, se manie avec prudence (pas votre truc, ça) tout simplement car elle porte en elle la hiérarchisation des êtres humains. Elle porte en elle l'exclusion, la catégorisation et le drame.

Bien sûr il ne s'agit pas de nier les différences mais en quoi la petite fille née en France, de parents cambodgiens par exemple (puisque Frédéric Chau était sur le plateau pour parler de son parcours justement), qui va à l'école en France et deviendra peut-être neuro-chirurgienne ou spécialiste de la littérature médiévale, en quoi un gosse métis, martiniquais, d'origine tamoule, marocaine, en quoi tous ces gamins seraient-ils moins français que les petits blancs ('de souche' ? Vous n'avez pas utilisé ce terme propre à l'extrême-droite mais, il vous brûlait les lèvres) ?

Car c'est à cela que mènent vos propos, Mme. Bien sûr, ceux que vous visiez vraiment étaient les Musulmans. Je ne sais même pas si vous pouvez imaginer que certaines personnes d'origine maghrébine puissent être athées. À vous écouter, elles portent toutes la burqa ou la djellaba et se baladent Coran en main dans la cité. Mais qu'avez-vous même simplement proposé face à, si c'est ce dont vous vouliez parler, la primauté donnée par quelques-un à leur religion ? Avez-vous posé le débat sur l'Islam, sur son évolution indispensable, sur la prééminence de la laïcité et de la loi républicaine sur toutes les interprétations religieuses en France ? Non, rien de tout cela. Pas la moindre analyse. 'Juste' la porte ouverte à toutes les stigmatisations.

Alors, moi je suis vraiment fatigué de ces petits politiciens de bas niveau (alors que l'époque exigerait des visionnaires), de ces Rastignac, Bel Ami et autres Magdelon qui sont prêts à briser ce qu'il nous reste de liant commun dans le seul but d'assouvir leurs ambitions personnelles.

Car finalement, c'était un numéro de danse du ventre que vous nous avez effectué. En direction des électeurs FN, leurs cadres et dirigeante. Envers Mr Sarkozy également, toujours plus à droite, sur la ligne Buisson-sans-Buisson; pour lui montrer, avant les primaires de votre parti, vos capacités à attirer les électeurs les plus réactionnaires.

Bref, de la tambouille interne, médiocre. Faite sur le dos du vivre-ensemble et de la République.

Alors, s'il vous plait Mme, la prochaine fois, vos entretiens d'embauche : ne nous les infligez pas sur le service public. Vous blessez inutilement des gens. Vous encouragez la bêtise. Vous rapetissez la politique, insultez ceux que vous appelez 'les vrais gens' et abîmez la France. La prochaine fois, Mme, faites donc vos offres de service directement dans le bureau de Mr Sarkozy. Ou dans celui de Mme Le Pen.

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