Les Trolls communs
Participant voici deux jours à un échange musclé, certes mais, urbain, sur 'le' sujet du moment (mon interlocuteur en appelait au féminisme pour défendre le livre de Mme Trierweiler; je demandais pour ma part si, après des années de journalisme politique au plus haut niveau, jouer désormais à " Candy au pays des grands méchants fauves " n'était pas plutôt contre-productif, du point de vue de la cause des femmes) lorsqu'un excité masqué débarqua dans la joute verbale, " vendu ", " pourri " et autres délicieuses urbanités en guise de mots de présentation. L'ancienne première dame et le marasme politique actuel disparurent d'un coup, laissant place à un hystérique caché et enragé.
Le troll est une espèce parasitaire sale et agressive dont le seul but est de nuire. Il ne trouve sa satisfaction qu'en blessant ses proies (généralement au niveau du bas-ventre) et en s'imaginant spirituel. La localisation de cette population très résistante aux arguments raisonnés se situe généralement aux périphéries. Le troll consacre énormément de temps sur les réseaux à la recherche de nouvelles victimes, délaissant vie sociale, amoureuse et sexuelle. Il n'est ni une espèce protégée ni menacée. Son développement est exponentiel.
Qui n'a jamais été pris à partie, lors d'une discussion sur un forum, une page Facebook ou sur Twitter par une de ces créatures belliqueuses ?
Tel un morpion que l'on ne voit pas venir, dans un milieu que l'on croyait sain, il vous fond dessus en piqué et est peu commode à décrocher. Humour obscène, impolitesse maximale, sentiment de toute puissance planqué dans son antre anonyme, personnalisation des attaques : le troll ne vous connaît pas mais, cherche au plus vite l'argument urticant, la prise la plus efficace pour vous faire sortir de vos gonds. Il se sent d'autant plus malin que, lui, ne présente jamais son flanc.
Car, ne cherchons pas plus avant, tels sont ses seuls vrais plaisirs : humilier, fanfaronner.
Votre nom est vite détourné, ridiculisé. Si photo il y a, votre physique est rapidement ciblé. Les allusions sexuelles, lourdes et dévalorisantes, ne tardent jamais à arriver. Il teste, tâtonne, renifle de son gros groin entraîné : - " Qu'est-ce qui va bien pouvoir l'énerver ? " Mon nom laissant peu de doutes quant à mes origines bretonnes, j'ai eu le droit, dans ce cas précis, même si (surtout) je ne lui répondais pas directement, à des " Bovary monte à Paris ", " paysan Breton ", " les Kevin parlent politique ", " reste dans le 14ème, le bouseux ", etc, etc, pour n'évoquer que les posts aimables... Agaçant.
Peu importe le sujet initial du débat (culture intensive de la pomme de terre en milieu aride, macro-économie, sexe des anges, etc...) : le troll, qu'il soit brun, rouge ou blanc, a toujours raison. Du moins, telle est son opinion.
Véritables exercices de contrôle de soi, les fâcheuses rencontres avec ces bestioles bêtes et méchantes dépourvues de nom et de visage, devraient être enseignées aux novices dans les temples du Bhoutan. Met d'avis que plus d'un bonze y perdrait alors de sa légendaire zenithude. L'agacement passé (le seul moyen étant de quitter la discussion car le troll, tel le pit-bull, ne desserre jamais la mâchoire), on reste interdit sur sa chaise, se demandant comment une telle agressivité vaine et une telle perte de temps sont concevables. Arrive alors le temps de la pitié pour cette sale teigne triste et probablement bien seule. Pour être honnête, cette pensée est fugace...
Leur multiplication sur la toile, voire leur prise de pouvoir, ne dit rien de bon sur la santé mentale de nos sociétés. Ceux qui pouvaient encore au début passer pour quelques cas d'école cliniques, sont devenues une espèce à part entière : les trolls communs.
Leurs jeux ego-centrés et malsains, tournant parfois, virant souvent, aux dérapages racistes, antisémites, sexistes, homophobes, etc..., ne font plus même soupirer : ils ajoutent juste encore à la morosité et l'ambiance mortifère du moment.
Sur Twitter, grande zone de non-droit, un journaliste comme Guy Birenbaum, pour ne citer que lui, reçoit sa dose quotidienne d'insanités antisémites (le dernier, tellement excité par sa propre puanteur, en a oublié de porter son masque et se retrouvera bientôt - heureusement, enfin - devant les tribunaux).
'Bloquer', 'bloquer', 'bloquer' : fatigant. Impossible, désormais, de ne pas recevoir sa piqure régulière de venin ? Fort de café, quand on y pense, que cette vermine parvienne à nous couper la chique et imposer partout l'irrespect quand bon lui semble ! Depuis quand les rampants mènent-ils le bal ?
Raison gardée, sourire méprisant aux lèvres, faisons grand ménage en leur rappelant ce qu'ils sont : des grotesques dépressifs. Et, à chaque nouvelle confrontation, rappelons-nous ce mot d'ordre : - " À bas les trolls ! Dehors, les haineux ! " Bloquez, signalez, balayez !
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